Au gui la guigne…
Superstition ?
Un
peu de sel renversé sur la table : le malheur va s’abattre sur la
maisonnée. Vite une pincée jetée derrière l’épaule gauche, sans regarder, sans
se retourner, pour conjurer le sort (comme quand on lance un caillou dans un
paquet bien ficelé, à la croisée de quatre chemins pour faire disparaître les
verrues et les coller aux malheureux qui vont ramasser le cadeau).
Superstition non !
Simple précaution…
« Si ça ne
fait pas de bien, ça ne fera pas de mal non plus » disait la tante Odette.
J’aime
les plantes vertes, mais je garde en mémoire ses recommandations…
Jamais
une misère (Tradescantia ) quelle que soit sa couleur ou sa
variété, n’aura le droit d’élire domicile dans ma maison ou sur mon balcon. Cette plante
increvable ferait entrer la misère dans mon intérieur. Je m’en passerai donc…
Par précaution, en prime pour conjurer le sort, on ne sait jamais, je cultive les herbes aux charmes bénéfiques. Je me plie aux coutumes.
Par précaution, en prime pour conjurer le sort, on ne sait jamais, je cultive les herbes aux charmes bénéfiques. Je me plie aux coutumes.
Tradition ?
Non ! Un vieil
héritage auquel je suis attachée.
Un
trésor qu’Odette m’a légué.
Pour sainte Catherine, j’ai replanté ma pharmacopée végétale. De quoi m’assurer la
santé toute l’année.
Viscum album, vénéré chez les Celtes,
symbole
d’immortalité.
Certains s’obstinent à en reconnaître les vertus. Moi, je l’évite. Surtout ne pas m’en offrir ! Il porte la guigne.
Certains s’obstinent à en reconnaître les vertus. Moi, je l’évite. Surtout ne pas m’en offrir ! Il porte la guigne.
Si
par malheur un simple brin parvenait à pénétrer chez moi, je le brûlerais, sans
attendre février et les recommandations de l’Eglise, comme le faisait la tante Odette
et le ferais disparaître dès le 1° janvier passé.
Pourquoi la vieille tante abhorrait-elle cette plante adorée dans le Nord? Que représentaient pour elle
ces perles de fêtes? Elle avait peur de quoi la vieille Tante ? Peur des
forêts épaisses du Nord où, des sources sombres, jaillissait l’eau sans compter.
Peur des remontrances de Monsieur le curé ? Peur d’avoir à se confesser pour avoir
rêvé de robes blanches, de couronnes immaculées piquées de fleurs immortelles, de
serpes d’or. Elle obéissait à qui ? Aux sœurs du catéchisme qu’elle fréquentait
et qui lui intimaient l’ordre d’oublier les rites païens et de brûler ses
symboles au bûcher de La Chandeleur?
Je
pense plutôt, quand je me rappelle ses enseignements, qu’elle haïssait tout
simplement ce parasite qui suçait la sève de ses pommiers et autres fruitiers,
et que, elle qui avait horreur des processions, des manies religieuses, des vieilleries, du buis béni des
Rogations, du laurier béni couronnant les crucifix, des bouquets de mariés
asséchés dans les globes, avait trouver un moyen élégant et discret, en
exterminant par le feu les branchettes sèches et les feuilles rabougries des
décorations vieillottes, d’éviter la poussière des expositions fétichistes sur son buffet et frapper
l’imagination de ses pitchounets trop candides.
La décoration de ma crèche est
terminée.
Pour Noël et le jour de l’an, il
n’y aura pas de bouquet de gui, suspendu au-dessus de mes santons.