lundi 16 décembre 2013

SUPERSTITIONS ET TRADITIONS




                Au gui  la guigne…




                                                    
Superstition ?
Un peu de sel renversé sur la table : le malheur va s’abattre sur la maisonnée. Vite une pincée jetée derrière l’épaule gauche, sans regarder, sans se retourner, pour conjurer le sort (comme quand on lance un caillou dans un paquet bien ficelé, à la croisée de quatre chemins pour faire disparaître les verrues et les coller aux malheureux qui vont ramasser le cadeau).
Superstition non ! Simple précaution…
« Si ça ne fait pas de bien, ça ne fera pas de mal non plus » disait la tante Odette.
J’aime les plantes vertes, mais je garde en mémoire ses recommandations…
Jamais une misère (Tradescantia ) quelle que soit sa couleur ou sa variété, n’aura le droit d’élire domicile dans ma maison ou sur mon balcon. Cette plante increvable ferait entrer la misère dans mon intérieur. Je m’en passerai donc…
Par précaution, en prime pour conjurer le sort, on ne sait jamais, je cultive les herbes aux charmes bénéfiques. Je me plie aux coutumes.


Tradition ?
Non ! Un vieil héritage auquel je suis attachée.
Un trésor qu’Odette m’a légué.
Pour sainte Catherine, j’ai replanté  ma pharmacopée végétale. De quoi m’assurer la santé toute l’année.
En décembre pour la sainte Barbe, j'ai fait germé mes lentilles et mes grains de blé pour amener la prochaine année, richesse et prospérité. 

 
Mes plantations levées termineront  la saison
dans ma crèche.                                          
 Et le Gui ? Porte-Bonheur...?
Viscum album, vénéré chez les Celtes, symbole d’immortalité.
Certains s’obstinent à en reconnaître les vertus. Moi, je l’évite. Surtout ne pas m’en offrir ! Il porte la guigne.
Si par malheur un simple brin parvenait à pénétrer chez moi, je le brûlerais, sans attendre février et les recommandations de l’Eglise, comme le faisait la tante Odette et le ferais disparaître dès le 1° janvier passé.

Pourquoi la vieille tante abhorrait-elle cette plante adorée dans le Nord? Que représentaient pour elle ces perles de fêtes? Elle avait peur de quoi la vieille Tante ? Peur des forêts épaisses du Nord où, des sources sombres, jaillissait l’eau sans compter. Peur des remontrances de Monsieur le curé ? Peur d’avoir à se confesser pour avoir rêvé de robes blanches, de couronnes immaculées piquées de fleurs immortelles, de serpes d’or. Elle obéissait à qui ? Aux sœurs du catéchisme qu’elle fréquentait et qui lui intimaient l’ordre d’oublier les rites païens et de brûler ses symboles au bûcher de La Chandeleur?

Je pense plutôt, quand je me rappelle ses enseignements, qu’elle haïssait tout simplement ce parasite qui suçait la sève de ses pommiers et autres fruitiers, et que, elle qui avait horreur des processions, des manies religieuses, des vieilleries, du buis béni des Rogations, du laurier béni couronnant les crucifix, des bouquets de mariés asséchés dans les globes, avait trouver un moyen élégant et discret, en exterminant par le feu les branchettes sèches et les feuilles rabougries des décorations vieillottes, d’éviter la poussière des expositions fétichistes sur son buffet et frapper l’imagination de ses pitchounets trop candides.



La décoration de ma crèche est terminée.
Pour Noël et le jour de l’an, il n’y aura pas de bouquet de gui, suspendu au-dessus de mes santons.