Couleurs d’Isula Bella
Un
nouveau roman, inspiré par la lumière de l’île.
La
vie d’un jeune corse amoureux des couleurs d’Isula Bella.
Les
souvenirs de son enfance à Ajaccio, de son départ pour le village quand éclate
la deuxième guerre mondiale, et ses premiers apprentissages qui le conduisent
dans la voie picturale.
Le
génie de ce jeune peintre, étouffé par le carcan familial et la jalousie de sa
femme va sombrer dans le conformisme jusqu’à sa décision de retrouver la
liberté et avec elle, une nouvelle inspiration et le bonheur.
Lire
quelques extraits en cliquant ci-dessous:
..."Je
fréquentais encore l’école primaire quand la guerre a éclaté. Je m’appelle José
Cortinovu, en français mon nom s’écrit Cortinovo.
Ma
famille est originaire du village de Cortinovu,
un village farouche, indomptable, perché sur la montagne, protégé par Dieu et
son clocher, défendu par les hommes postés sur la tour carrée. Un torrent
furieux a lacéré la roche pour former un fossé infranchissable, une gorge
sauvage, noire, profonde, aux flancs acérés.
La guerre, mon père n’y croyait pas. La dernière,
la Grande, le grand-père l’avait assuré, devait être « la der des
ders », et puis il y avait eu Munich. Après le discours du Maréchal, il
répéta que la Corse ne risquait rien. C’était une île ! Qui pouvait nous
envahir ? Sûrement pas les Italiens, inconstants, hâbleurs, qu’on ne
prenait pas au sérieux. Pantins noirs clonés, marionnettes mussoliniennes
désarticulées, ridicules dans leurs uniformes cintrés ! « Aucune
difficulté, disaient les vieux, pour s’en débarrasser ! ». Les
enseignements de l’histoire étaient là pour nous conforter. Ils ne pèseraient
pas lourd devant la détermination des patriotes. N’avions-nous pas secoué le
joug de l’empire romain, défait l’envahisseur aragonais, chassé l’occupant
génois ? Alors les matamores du Duce !
La Rome fasciste !... "
............
..."Une
grosse poissonnière était devenue ma plus fidèle amie et complice. C’était une
femme imposante, aux cheveux noirs épais, roulés en chignon, aux cuisses
énormes qui débordaient de sa chaise de paille lorsqu’elle s’asseyait. Elle
trônait impériale, monstrueuse derrière son étal, urinait quand le besoin s’en
faisait sentir, debout, superbe, les jambes simplement écartées au-dessus de la
rigole creusée dans le sol qui recueillait les eaux vertes mêlées aux
entrailles sanguinolentes des poissons. Elle se soulageait, indifférente aux
regards étonnés, fière et altière au-dessus du petit nuage de gouttelettes chaudes
et jaunâtres qui se formait sous le banc. Elle imposait ses propres lois
sociales et régnait sans partage sur les travées, en veillant au respect des
bonnes règles des transactions. Nul n’échappait à son autorité qui découlait
autant de sa voix puissante que des poils qui garnissaient son menton, mobiles
et drus comme des piquants d’oursins ou des barbes de légionnaires et qui la
faisaient ressembler à un adjudant-chef de la coloniale en retraite. Entre elle
et moi, s’étaient établies une confiance mutuelle, une complicité amicale, puis
une grande affection. Dès qu’elle m’apercevait, elle claironnait d’une voix de
stentor : « Hé José ! Mon Coco !». Elle brandissait son
couteau au-dessus de la tête en signe de ralliement, puis me prenait dans ses
bras durs, lisses et ronds comme des manches d’aviron et me couvrait de baisers
épineux. Elle débordait de tendresse de tous les plis de son corps obèse. Moi,
je restais un moment contre elle, à l’abri, en sécurité dans ce mélange curieux
d’odeur de transpiration de femme et d’écailles de poisson. Ses seins étaient
larges et doux comme un oreiller de plumes. J’aimais y poser mon front, et la
chaleur qui s’en dégageait me faisait oublier le personnage difforme et la
puanteur visqueuse des viscères des rascasses vidées qui jonchaient le sol
glissant du marché."...
Mais dis! Tu sais que tu écris bien! Elle est superbe ta poissonnière! La digne soeur de la buraliste d'Amarcord.
RépondreSupprimerAmitiés
Arlette Aguillon