dimanche 1 juillet 2018

Corse, île de couleurs


Couleurs d’Isula Bella

Un nouveau roman, inspiré par la lumière de l’île.
La vie d’un jeune corse amoureux des couleurs d’Isula Bella. 

Les souvenirs de son enfance à Ajaccio, de son départ pour le village quand éclate la deuxième guerre mondiale, et ses premiers apprentissages qui le conduisent dans la voie picturale.




Le génie de ce jeune peintre, étouffé par le carcan familial et la jalousie de sa femme va sombrer dans le conformisme jusqu’à sa décision de retrouver la liberté et avec elle, une nouvelle inspiration et le bonheur.

Lire quelques extraits en cliquant ci-dessous:


..."Je fréquentais encore l’école primaire quand la guerre a éclaté. Je m’appelle José Cortinovu, en français mon nom s’écrit Cortinovo.

Ma famille est originaire du village de Cortinovu, un village farouche, indomptable, perché sur la montagne, protégé par Dieu et son clocher, défendu par les hommes postés sur la tour carrée. Un torrent furieux a lacéré la roche pour former un fossé infranchissable, une gorge sauvage, noire, profonde, aux flancs acérés.
La guerre, mon père n’y croyait pas. La dernière, la Grande, le grand-père l’avait assuré, devait être « la der des ders », et puis il y avait eu Munich. Après le discours du Maréchal, il répéta que la Corse ne risquait rien. C’était une île ! Qui pouvait nous envahir ? Sûrement pas les Italiens, inconstants, hâbleurs, qu’on ne prenait pas au sérieux. Pantins noirs clonés, marionnettes mussoliniennes désarticulées, ridicules dans leurs uniformes cintrés ! « Aucune difficulté, disaient les vieux, pour s’en débarrasser ! ». Les enseignements de l’histoire étaient là pour nous conforter. Ils ne pèseraient pas lourd devant la détermination des patriotes. N’avions-nous pas secoué le joug de l’empire romain, défait l’envahisseur aragonais, chassé l’occupant génois ? Alors les matamores du Duce ! La Rome fasciste !... "
                                                            ............

..."Une grosse poissonnière était devenue ma plus fidèle amie et complice. C’était une femme imposante, aux cheveux noirs épais, roulés en chignon, aux cuisses énormes qui débordaient de sa chaise de paille lorsqu’elle s’asseyait. Elle trônait impériale, monstrueuse derrière son étal, urinait quand le besoin s’en faisait sentir, debout, superbe, les jambes simplement écartées au-dessus de la rigole creusée dans le sol qui recueillait les eaux vertes mêlées aux entrailles sanguinolentes des poissons. Elle se soulageait, indifférente aux regards étonnés, fière et altière au-dessus du petit nuage de gouttelettes chaudes et jaunâtres qui se formait sous le banc. Elle imposait ses propres lois sociales et régnait sans partage sur les travées, en veillant au respect des bonnes règles des transactions. Nul n’échappait à son autorité qui découlait autant de sa voix puissante que des poils qui garnissaient son menton, mobiles et drus comme des piquants d’oursins ou des barbes de légionnaires et qui la faisaient ressembler à un adjudant-chef de la coloniale en retraite. Entre elle et moi, s’étaient établies une confiance mutuelle, une complicité amicale, puis une grande affection. Dès qu’elle m’apercevait, elle claironnait d’une voix de stentor : « Hé José ! Mon Coco !». Elle brandissait son couteau au-dessus de la tête en signe de ralliement, puis me prenait dans ses bras durs, lisses et ronds comme des manches d’aviron et me couvrait de baisers épineux. Elle débordait de tendresse de tous les plis de son corps obèse. Moi, je restais un moment contre elle, à l’abri, en sécurité dans ce mélange curieux d’odeur de transpiration de femme et d’écailles de poisson. Ses seins étaient larges et doux comme un oreiller de plumes. J’aimais y poser mon front, et la chaleur qui s’en dégageait me faisait oublier le personnage difforme et la puanteur visqueuse des viscères des rascasses vidées qui jonchaient le sol glissant du marché."...

1 commentaire:

  1. Mais dis! Tu sais que tu écris bien! Elle est superbe ta poissonnière! La digne soeur de la buraliste d'Amarcord.
    Amitiés
    Arlette Aguillon

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